Amasra était ma première grosse étape Turc après Istanbul. Et mis à part le fait que je me sois perdu dans les bois

Perdu sur le chemin d’Amasra

pour y parvenir, Amasra m’a de prime abord déçu tant les photos que j’en avais vu m’avaient inspirées. Cette petite cité balnéaire réputée pour être un des plus beau port de la Mer Noire est pourtant charmante mais le flot permanent de touristes assaillant les trop nombreux hôtels et restaurants brise un peu la quiétude et l’authenticité que j’avais fantasmé y trouver. Puis à force de flâner aux gré des petites ruelles de la forteresse et ses alentours, je me suis laissé surprendre par cette ville qui sait séduire les flâneurs. Ses grandes murailles surplombent la mer tandis qu’une mosaïque de maison colorées se découpent sur les vertes montagnes de l’arrière pays. Elle recèle aussi ses petites criques secrètes, ses terrasse de café a fleur de l’eau, et sa pointe aux rebelles, comme je l’ai baptisé, où le jeunes se retrouvent pour boire une bière loin des regards inquisiteurs des plus anciens. Et c’est finalement conquis et détendu que je quitte la ville et la côte pour m’enfoncer dans les montagnes en direction de safranbolu.

La pointe aux rebelles
Amasra

Situé à la convergence de trois vallées encaissées, Safranbolu était autrefois un important carrefour commercial reliant la Mer Noire à l’intérieur des terres. Prospères, les habitants y firent construire d’imposantes maisons ottomanes qui sont restés très bien préservées. Ce qui fait que la ville est inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO. S’y promener est un véritable saut dans le temps à l’époque de l’Empire ottoman et un plaisir visuel avec un dédale de ruelles pavées, bordées par les façades en briques ou en bois et les échoppes des artisans que l’on peut admirer travailler. Au cœur de la ville trône la mosquée dont l’intérieur est somptueusement décoré, et aussi le hammam, un des plus anciens de Turquie encore en activité. Après deux heures à me faire faire suer, frictionner, savonner, rincer, doucher, j’en ressors comme neuf.

Safranbolu
Et ses ruelles

Si Safranbolu est un petit écrin de l’Histoire, Karabuk, la ville voisine, en est son exact opposé. Illuminée par des couleurs criardes, un immense drapeau truc flotte sur la ville, et partout des citées étudiantes ultra modernes fleurissent autour d’imposantes mosquée sans charme. Ville d’origine industrielle, son université forme aujourd’hui une grande partie des futurs ingénieurs du pays, qui se retrouvent le soir dans des bars branchés. J’y fait d’ailleurs ma première soirée étudiante sans alcool. Une révolution.

Karabuk

Quatre jours plus tard dont trois dans les montagnes, je rallie Sinop. Véritable colline émergeant des flots de la Mer Noire, elle n’est reliée au continent que par une mince bande de terre de 100 mètre de large à l’endroit le plus étroit. Port stratégique, la ville a longtemps été une place forte des civilisations qui ont occupé l’Anatolie comme en témoigne les impressionnantes fortifications qui protégeaient la ville des attaques terrestres. Mais elle est aujourd’hui plus une cité balnéaire que historique.

Diogène aux portes de Sinop

C’est ici cependant que je fait la rencontre d’Islam, plongeur, musicien, fan de Beyoncé, un peu poète. IL s’en suit une agréable soirée, pendant laquelle il me fait visiter l’atelier où son père donne naissance à des baglamas ( guitare Turque ou Grecque) depuis d’imposants troncs d’arbres, avant de me jouer quelques morceaux. Et nous terminons la soirée en partageant une soupe de poisson et une bière. Malgré la barrière de la langue, ce fut une belle rencontre, et un vrai moment de partage simple et authentique.

L’atelier de luthier et les baglamas

Depuis maintenant deux semaines, me voilà devenu nomade, mode de vie ancestrale fondé sur la notion de déplacement. Encore pratiqué aujourd’hui par certains peuples qui se déplacent pour subvenir à leurs besoins et ceux de leurs troupeaux. Moi je fais maintenant parti de cette nouvelle espèce un peu excentrique et majoritairement constituée d’occidentaux que sont les nomades culturels. À la recherche d’authenticité, de partage, et de découvertes, ils parcoururent la planète dans tout les sens peut-être pour en trouver un à leur vie et au monde.

Ce nouveau mode de vie implique deux contraintes essentielles. La première est évidente et est inhérente au nomadisme: se déplacer. Ce qui implique que quelque soit le temps, qu’il pleuve, qu’il vente, fasse froid ou chaud, que j’en ai l’envie ou non, je dois enfourcher mon vélo et donner les premiers coups de pédales pour briser l’inertie et avancer un peu plus à chaque tour de roue vers ma destination. Les 20 premiers kilomètres sont toujours les plus durs, mal au fesses, mal aux jambes, le sentiment de faire du sur place, jusqu’à ce que l’esprit se rende à l’évidence et se mette lui aussi à vagabonder. L’inertie du mouvement fait le reste et les kilomètres s’égrainent.

La deuxième est consécutive à la première: vivre dehors, ce qui se traduit par subvenir à ses besoins quelque soit l’endroit où l’on se trouve. Manger est facile. La nourriture turque est variée, délicieuse, et abordable. De plus, ils mange du pain autant que les français ont la réputation d’en manger. Quant au thé, ils ne boivent que cela. Le plus petit village est donc pourvu d’une boulangerie et d’un café où les anciens sirotent çay sur çay ( prononcer tchaï) en jouant au tavla (variante du backgammon).

Se loger reste moins évident, et cela a été l’une de mes grandes préoccupations souvent bien avant le couché de soleil. À la campagne, l’accueil dans les petits villages est assez simple. Et si il arrive qu’ils tombent des nues en me voyant arriver au crépuscule sorti de nul part sous une pluie battante, l’ancestrale tradition de l’hospitalité truc héritée des peuples nomades seldjoukides fait qu’ils me trouvent toujours un petit coin de paradis pour m’accueillir comme une cabane au fond d’un jardin, un jardin d’une magnifique maison ottomane, ou le perron de l’ancienne école.

Première nuit sous la pluie en hamac

En ville, je ne suis plus l’Etranger, mais un inconnu parmi les autres. De plus, mes instincts de citadin reviennent au galop et me crient de succomber aux sirènes du confort d’une douche chaude et d’un bon lit dans chambre d’hôtel. Mais avec un peu de persévérance, les occasions de se trouver un endroit ne manquent pas, comme la pelouse douillette d’une station service ou sur une plage bercée par le bruit des vagues. Et parfois au hasard des rencontres, la chance vous sourit. Comme à Küre où après leur avoir aimablement demandé, la police m’a trouvé une place dans un foyer étudiant, ce qui reste une soirée d’anthologie cerné par une horde d’étudiants curieux. Comme à Sinop, où après cette heureuse rencontre, j’ai pu planter ma tente sur un petit terrain en plein cœur de la ville avec une vue imprenable sur les remparts et la Mer Noire.

Sinop à l’aube

Et si, je l’ai dit, me loger fut au début une de mes principales préoccupations, j’ai fini par lâcher prise et embrasser cette vie nomade où j’ai la liberté d’ignorer de quoi demain sera fait. Et c’est maintenant bien souvent les gens rencontrés le soir, qui voyant l’heure avancer, se préoccupent de où je vais dormir.

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